Yves Viollier "Raymonde"

"Oh Dieu, pourquoi donc en mourant ne nous as-tu pas mués en dieux ! Ma trajectoire quand je m'éfforce de toute mon âme de la maintenir en droit ligne, si je me retourne elle ressemble à ces sillages laissés par les avions, dont le trait un instant précis, peu à peu se dissout, devient flou. Et tout est à refaire, tout s'efface, tout se ternit. Seigneur, donne moi un bout de ton crayon à la pointe si bien taillée, et guide ma main, que je fasse le portrait de ta création, que ce que j'écris te ressemble" Yves Viollier "Raymonde"



"Il va sans dire que la vie n'étant pas une bibliothèque rose elle ne respecte guère ces intentions édifiantes" François Nourissier in "Musée de l'homme"

jeudi 20 mai 2010

Ce livre qui racontait la fragilité de l'Aiguillon.

Après Xynthia. En 2001, l'écrivain Yves Viollier a narré l'histoire de la construction de la digue de l'Aiguillon. Il y est revenu après le passage de la tempête Xynthia.

Quelle avait été votre approche de la baie de l'Aiguillon pour écrire Les Lilas de mer ?

J'ai longtemps pensé que cette baie n'était pas une terre romanesque. Mais le jour où je suis allé en mer avec des boucholeurs, où j'ai rencontré des éleveurs de moutons dans le marais, j'ai découvert un monde fabuleux. J'ai alors consulté les archives. Deux ou trois siècles auparavant, l'Aiguillon se trouvait à la pointe. Et c'est une tempête qui l'a rayé. Quand on a déplacé le bourg là où il se trouve aujourd'hui, on le pensait suffisamment en retrait. Quand à la Faute, elle n'existait alors quasiment pas... Mais c'est surtout quand j'ai lu les archives concernant la digue avec toutes ces populations étrangères qui étaient venues la construire à la fin du XIXème siècle, que j'ai compris que je tenais mon histoire ! ... Ils étaient venus construire cette digue tant réclamée après la tempête et les inondations de 1877 et de 1891, qui avaient été aussi importantes que celle de février dernier.

Vous déguisez cependant votre intrigue : l'Aguillon devient St Nicolas, l'Ile de la Dive celle de la Vive ?...

Saint Nicolas est le nom de l'église de l'Aiguillon. Mais j'ai effectivement brouillé les postes car je ne voulais as blesser. Ce meurtre qui fait l'intrigue a bien eu lieu. Et pour m'investir dans l'intrigue, j'ai passé 24 heures avec les détenus de la prison de Saint Martin de Ré, l'antichambre du bagne de Cayenne. Les éléments du puzzle sont authentiques, mais j'ai fait bouger ces pièces. Je voulais avant tout comprendre ces cabaniers qui ont gagné la terre sur la mer et ont construit leur maison dessus, certains avec l'orgueil de regarder de haut ce plat pays. Je voulais cerner cette population vendéenne, quio n'a rien à voir avec celle du bocage, même si ce sont des paysans de la mer. J'ai d'ailleurs garder une impression forte : quand vous êtes dans leurs bouchots, vous avez l'impression d'être dans une vigne.

Aujourd'hui, les données sont-elles différentes, après le passage mortel de Xynthia ?

D'abord, je ne suis pas du tout surpris. Pour écrire mon livre en 2000, j'avais fait le tour de ce territoire avec le maire d'alors, Feu Pierre Roy. Je lui avais marqué mon étonnement, mon effarement même de voire toutes ces constructions en dessous du niveau de la mer "Auriez-vous oublié ?" Avais-je demandé à Pierre Roy."La digue est là !". m'avait-il répondu. Seulement, voilà, les constructions humaines ne peuvent rien faire face à la puissance des éléments, même si nous les humains avons l'orgueil de nous croire assez forts. C'est ce que je raconte dans les Les Lilas de mer.

Et l'histoire nous rattrape ! Aujourd'hui, faut-il mettre en place des périmètres de zones inconstructibles ?

J'ai assisté à plusieurs réunions. Ma première réaction à été de me dire que les gens étaient déjà dans l'oubli de ce qui venait de se passer. On dit maintenant que l'Etat est allé vite ! On lui a pourtant demandé une réponse rapide et je crois qu'il a bien fait de prendre le taureau par les cornes. Je peux comprendre les déchirures et je suis d'accord que l'on tienne compte des vrais cas particuliers et de se méfier de la raideur du couperet administratif. Mais j'ai aussi entendu à ces réunions des témoins de me dire : je ne veux pas rester parce que je ne veux plus revivre cette nuit-là !

Votre prochain roman vous fait-il revenir à l'Aiguillon sur Mer ?

Je viens de finir mon dernier manuscrit, "Délivre-moi", rédigé cet automne et cet hiver, à paraître chez Laffont. Je n'aime pas trop me livrer tant qu'un livre n'est pas publié, je suis prudent mais oui, j'ai commencé à me documenter et à écrire sur l'Aiguillon. Mais ne le répétez-pas !

Recueilli par Philippe Gilbert...


 
Ces lilas qui poussent sur une terre rude.

"Lisez-donc le livre de Viollier !" s'eset fendu à plusieurs reprises le préfét Jean Jacques Brot, pour marquer sa position lors des réunions Xynthia. Car les Lilas de mer  nous rappellent effectivement la fragilité de ce pays sous le niveau de la mer. D'autant que ces "Lilas de mer" sont de la meilleure veine populaire du "Zola vendéen" avec une intrigue forte qui lui valut le prix Exbrayat en 2002.

Viollier emploie avec bonheur le "je" pour mettre en scène ce jeune curé du bocage confronté aux rudes maraichers, mais aussi ces étrangers du Limousin, de Corrèze et d'Italie venus construire la digue, classé par le reste de la population dans  "le camps des caroulets".

On aimera le caractère trempé des personnages, notamment celui de "Lilas la mularde", l'héroïne, qui tien son bouchot pour survivre à la tragédie  qui l'assaille. Mais Yves Viollier s'attache surtout au combat éreintant de ces boucholeurs de l'estran et paysans de la dune, qui travaillent parfois comme des bêtes pour survivre sur un territoire improbable pouvant revenir à l'océan du jour au lendemain.

C'est pourquoi on regardait sans cesse du côté de la grande digue. Mais elle résistait" constate le jeune curé qui ignore tout du marais et des maraîchers mais connaît le secret des âmes.

Ce livre plus que jamais indispensable est sorti chez Robert Laffont, il existe aussi en version "Pocket" Prix 6.65.

Je vous fait grâce des pubs qui sont au dessous de cet article sur Ouest France ce 14 mai... Des pubs sur des promoteurs immobiliers... Des portes ouvertes pour visiter des maisons témoins... C'est d'un goût...

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