Et c'est tant mieux !
Je peux dire haut et fort sans craindre les foudres des afficionados de cet écrivain que JD Salinger a trouvé son maître dans l'art du mystère en la personne d'Antoni Casas Ros. Ce dernier est plus malin que lui car on a jamais vu son visage. JD Salinger on peut aisément dessiner un portrait robot via le logiciel Morphing !
Chi è Antoni ? On le dit défiguré suite à un accident de voiture ! Mais est ce bien vrai ? Il peut être un magnifique jeune homme, un gars comme tout le monde. Le gars défiguré du "Théorème d'Almodovar" un écran de fumée pour mieux entrenir le trouble ! Mais aux dernières nouvelles, Antoni a eu un terrible accident et sa vie en a été bouleversée. Si ça se trouve on l'a peut être croisé. Tout le monde peut être Antoni Casas Ros et il y a autant de représentations chimèriques de l'écrivain qu'il y a de lecteurs !
Il a tout compris, Antoni ! Il est finaud ! Il déteste ce que l'on appelle le spectacle de la promotion. Il hait ces auteurs qui se regardent le nombril et qui sont capables de toutes les bassesses rien que pour attirer quelques lecteurs supplémentaires !
Tiré de son recueil de nouvelles "Mort au romantisme"
P 59
"Avant d'offrir mon téléviseur aux intempéries en l'abandonnant sur la terrasse, j'ai eu le temps de vérifier une hypothèse : la substance est égale au frémissement des mots qui sont écrits mais se dilue dans ceux qui sont dits. Conséquence : lorsque des écrivains disent plus qu'ils n'écrivent, ils perdent toute relation amoureuse avec les mots, ils perdent leur essence et deviennent des "personnages". Après avoir vu les mêmes écrivains se comporter docilement, le sourire et la face aimables, prêt à essuyer n'importe quelle stupidité dans l'espoir de séduire quelques lecteurs de plus, j'ai lu leurs livres récents. Le diagnotisc est évident : les mots se perdent, la substance se perd, le visage se perd, les yeux se perdent. Plus les écrivains sont perdus, plus la télévision les aime et les affiche. On ne pourrait faire une émission littéraire sans montrer ceux que le système a réussi à domestiquer, à tuer à petit feu. On a presque l'impression qu'ils ne sont plus capables de parler et qu'un mauvais scénariste de télévision écrit leurs mots. Ils ont même le droit à la révolte et à une méchanceté calibrée par le dragon qui demeure invisible mais devant lequel ils se prosternent dans la salle de maquillage."
Suite à ce constat assez désolant, un seul remède, une seule solution : ne pas apparaître.
" C'est ce constat qui m'incite à ne pas apparaître, à continuer de flotter dans le magma informe d'un livre qui se cherche. Pour expérimenter, défricher à la machette. Pour tailler la masse des mots jusqu'à la chair il faut un vaste espace de silence que la moindre ingérence peut détruire. Ne pas avoir de visage est socialement difficile mais, du point de vue de la littérature, cela commence à m'apparaître comme un bienfait".
Loin des flashs, des plateaux de télé. Les interviews. Antoni reste un auteur sincère et qui suscitera le rêve tout en restant celui qu'il est : un écrivain amoureux des mots. Celui qui aura plus de respect pour son lectorat que n'importe quels écrivains habitués des plateaux de télés balançés comme des attractions de fêtes foraines.
"Le dragon médiatique est puissant lorsqu'il trouve sa proie mais il ne lance pas le feu, il engloutit lentement l'aspirant qui désire se montrer à des millions de regards. L'écrivain devient une sorte de fast-food étouffé entre deux buns blaffards et il se trouve consommé son rêve est alors atteint, il est célèbre. Qu'il n'écrive plus, au sens fort du terme, semble tout à fait secondaire pour ceux qui l'ont réduit à une image."
Et que les libraires complices à cette mascarade prennent note ! Ceux qui exposent les mêmes auteurs, les mêmes bouquins en pature aux gens. Si si, ceux la qui sont capables de mettre des piles de Levy, Musso, Gavalda et autres consorts par exemple comme s'il s'agissait de forcer aux gens de les lire ! Cela fait tellement branché ! Ils feraient mieux de méditer ceci :
"Le vrai lecteur, lui, trouve l'écrivain le plus caché. Il le déniche de mille façons obscures. Sa substance entre en la résonnance avec celle du texte. C'est de cette seule manière que la littérature survit. Les livres sont patients, ils attendent parfois des années qu'un lecteur passionné les découvre. Ils se reposent dans une petite librairie, ils guettent le lecteur, l'attirent, le captivent au hasard d'une page"
Antoni a totalement raison et j'espère qu'il sera écouté et suivit. Un écrivain était né avec le "Théorème d'Almodovar", on est face à un sacré penseur et un révolutionnaire (en nageant à contre courant). Le mystère va donc perdurer... Tant mieux pour nous les lecteurs ! Cela attisera les curiosités, alimentera le buzz dans l'indifférence de l'auteur par ailleurs.
A la fin de la lecture de ce recueil, il me restera qu'à penser, imaginer l'auteur dans ma tête et attendre la parution de son futur roman fin 2009 "Enigma" (cela ne s'invente pas !) et je continuerai de me perdre dans ce jeu de pistes, ce labyrinthe qu'a créé Antoni.
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